Rio + 20 : le Brésil gagnant, la planète perdante
Au moment où elle s'achève à Rio de Janeiro, le bilan de la conférence des Nations unies sur le développement durable peut se résumer de manière simple : il y a un gagnant, le Brésil, et une perdante, la planète. Rude constat, vingt ans après l'emblématique Sommet de la Terre, qui, dans la même ville, avait posé les bases d'une politique de développement soucieuse de la préservation des ressources du globe.
Le pays hôte, le Brésil, a "réussi son coup", si l'on ose dire. Son objectif était de parvenir à un accord. Il l'a obtenu. Au prix d'une certaine brutalité, inhabituelle dans ce type de processus, il a débloqué en trois jours une négociation qui piétinait depuis six mois. Mais cela s'est fait par le bas, en supprimant purement et simplement tous les passages du projet de déclaration finale qui suscitaient des oppositions. Et en ne conservant que les pétitions de principe générales et consensuelles. Dès lors que personne ne s'attendait à un miracle, ce manque d'ambition n'est pas une surprise.
Mais la "profonde déception", voire la "colère", du Réseau Action Climat, qui regroupe quelque 600 ONG écologistes dans le monde, est compréhensible. Car, trois ans après l'échec retentissant du sommet de Copenhague sur le climat, c'est bien la planète qui est perdante dans cet accord a minima. Et pour les mêmes raisons.
Pour avancer, en effet, les négociations climatiques multilatérales ont besoin de deux moteurs : un groupe de pays leaders et des financements qui témoignent de leur détermination. Les deux font aujourd'hui défaut.
Il n'y avait pas grand-chose à attendre des Etats-Unis, qui n'ont jamais été en pointe sur ces questions et qui sont plus préoccupés par leur élection présidentielle que par l'économie verte et la crise écologique. Pas plus du Canada, qui partage cette attitude très conservatrice. Pas davantage de la Chine et de l'Inde, qui ont été d'une remarquable discrétion.
Quant aux pays du Sud, regroupés au sein du "G77", ils ont bien tenté un coup de force, à la veille de la conférence, en exigeant des pays riches qu'ils s'engagent à mettre sur la table 30 milliards de dollars par an jusqu'en 2017 et 100 milliards au-delà pour financer de nouveaux programmes. Ce fut peine perdue : les nations sollicitées ont fait la sourde oreille.
L'Europe, en particulier, semble avoir abandonné toute velléité de leadership en la matière. Engluée dans la crise de la zone euro, tétanisée par sa croissance en berne, sans ressort financier, elle s'est retrouvée isolée dans les négociations. Privée de son pouvoir d'influence, elle s'est montrée incapable de tirer vers le haut un texte final qui rabâche constats et engagements déjà anciens et ne formule pratiquement aucune proposition concrète nouvelle.
Le bilan est donc cruel : les lourds enjeux de la crise écologique sont esquivés. Et les chefs d'Etat pourront d'autant mieux se laisser aller à un lâche soulagement que l'agenda international ne prévoit plus aucun rendez-vous en la matière. Ils ne sont donc pas près d'être à nouveau interpellés sur leur inaction.