Il faut une réflexion sur les impacts de C-38


Entité: 
Le Devoir
Date de la référence: 
16 Juin, 2012

L’Association des biologistes du Québec (ABQ) lance un cri d’alarme à propos des impacts du projet de loi fédéral C-38, qui risque d’être adopté sans une « réflexion en profondeur sur les enjeux et les conséquences de ces changements ».

De son côté, ajoutait hier le Regroupement des organismes de bassins versants du Québec (ROBVQ), les changements apportés par le gouvernement Harper aux protections environnementales érigées depuis les années 1970 au Canada constituent des « entraves importantes pour la protection et la gestion durable des ressources en eau ».

Les deux groupes ont pris position dans ce dossier au moment où le projet de loi mammouth en était au marathon de rejet par les conservateurs majoritaires des centaines d’amendements déposés par les partis d’opposition.

L’ABQ vise tant les compressions budgétaires chez Pêches et Océans que les amendements aux lois environnementales et à l’habitat du poisson. Toutes ces mesures vont engendrer, à son avis, une baisse de la capacité d’analyse des ministères fédéraux ainsi qu’une perte de leur expertise. En ne protégeant plus les espèces de poissons non commerciales, pourtant à la base de la chaîne alimentaire, Ottawa fait tomber les dernières protections légales sur les petits ruisseaux situés en terres privées qui échappent, au Québec, aux lois sur la conservation mais qu’englobait la notion d’habitat du poisson.

Quant aux milieux humides, que Québec se propose de céder moyennant compensations, l’article 35 de la Loi sur les pêches était leur dernier rempart juridique s’il s’y trouvait le moindre poisson. Désormais, indique l’ABQ, plus rien.

D’autre part, les changements apportés par Ottawa aux évaluations environnementales vont, selon l’ABQ, augmenter la marge d’arbitraire du ministre fédéral de l’Environnement, dont le jugement risque de s’inspirer de motifs « politiques ».

« Le fait de raccourcir l’échéancier général de l’évaluation environnementale d’un projet aura des répercussions négatives sur le travail des biologistes », qui devront s’en tenir à des études moins approfondies, ajoute l’ABQ. La notion d’effets environnementaux, par ailleurs, ne couvrira que l’impact des projets sur les poissons, sur certaines espèces aquatiques et sur les oiseaux migrateurs, ce qui réduira énormément la portée des analyses d’impacts cumulatifs, qui peuvent s’avérer beaucoup plus nombreux, et que seule la législation fédérale exigeait, comme les impacts sur le climat, les pertes d’habitat, de biodiversité ou de qualité de l’air notamment.

Pour le ROBVQ, en faisant disparaître tous ces aspects des évaluations environnementales fédérales, le gouvernement Harper porte un dur coup à la protection des ressources en eau, un recul que ne justifie pas sa vision économique à court terme. Le regroupement cible aussi les « compressions drastiques [sic] dans les programmes hydriques et dans la recherche, la suppression de l’Enquête sur l’eau potable et les eaux usées des municipalités, les coupures dans les mesures de suivi des effluents, la promotion de la prospection sismique en mer ou encore l’exemption des pipelines et des lignes électriques des dispositions de la Loi sur les eaux navigables », autant d’aspects négligés par les médias, mais qui vont aussi frapper de plein fouet les acteurs sociaux sur le terrain.

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