Rapport sur les GES: les conservateurs sur la defensive
(Ottawa) Le gouvernement Harper a une fois de plus été forcé de défendre ses décisions en matière d'environnement, mercredi, après qu'un rapport eut prévenu que le Canada est en voie de rater ses propres cibles de réduction des gaz à effet de serre (GES).
Dans un rapport que son président qualifie d'«avertissement sévère», la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie prévient que les mesures adoptées par Ottawa et les provinces ne permettront pas au Canada de réduire ses émissions de 17% par rapport au niveau de 2005 d'ici à 2020. Cette cible, qui est beaucoup moins ambitieuse que celle du protocole de Kyoto, a été adoptée par Stephen Harper à la conférence de Copenhague de 2009.
Après avoir étudié en profondeur les mesures adoptées par les différents ordres de gouvernement, la Table conclut que le Canada n'atteindra que la moitié des réductions qu'il vise d'ici à 2020. Pire: les mesures qui permettront au pays de faire l'autre moitié du chemin seront les plus coûteuses à implanter.
Le président de la Table ronde, David MacLaughlin, affirme que le gouvernement fédéral est le principal responsable de cette situation.
«Il y a eu une incertitude politique qui a empêché le gouvernement fédéral d'agir, tant sous les libéraux que sous les conservateurs, dit-il. L'essentiel du progrès vient de l'action des provinces, mais chacune d'entre elles travaille séparément. En ce sens, c'est presque surprenant que nous ayons fait autant de progrès.»
Le gouvernement Harper a choisi une approche «sectorielle» pour réduire les émissions canadiennes de GES, c'est-à-dire que chaque secteur industriel se verra imposer des règlements pour limiter la pollution. Mais jusqu'ici, les règlements adoptés ne touchent que les secteurs des transports et de la production d'électricité.
Les gains réalisés par cette approche seront en partie annulés par l'expansion fulgurante de l'industrie du pétrole et du gaz. L'exploitation des sables bitumineux est à elle seule responsable de près de 7% des émissions canadiennes, et la production de pétrole à partir de cette ressource est appelée à tripler d'ici à 2030.
La réglementation pour encadrer l'industrie pétrolière et gazière est toujours sur la planche à dessin.
Selon le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair, ce rapport prouve que les conservateurs, qui se sont retirés du protocole de Kyoto, n'ont jamais eu l'intention d'atteindre leurs objectifs de Copenhague.
«Ils n'ont aucun plan pour atteindre ces cibles», a-t-il déploré.
Mais le premier ministre souligne que des progrès ont bel et bien été réalisés. «Il y a évidemment d'autres actions à considérer, a convenu Stephen Harper aux Communes. Toutefois, la réalité est que, quand ce gouvernement est arrivé au pouvoir, les émissions du Canada étaient en grande augmentation, alors que, maintenant, nos émissions de gaz à effet de serre sont en déclin.»
Chant du cygne
C'était le dernier rapport d'envergure de la Table ronde, qui est en voie d'être abolie par le gouvernement Harper. Son président ne cache pas sa déception devant la décision.
«Nous étions tout sauf des radicaux, a affirmé M. MacLaughlin. Nous étions le centre radical. Nous cherchions des manières de réconcilier les préoccupations économiques et environnementales.»