Les minières rejettent 180 millions de tonnes de déchets toxiques dans les eaux chaque année
Par Louis-Gilles Francoeur, Le Devoir
Des neuf minières internationales qui polluent le plus les eaux de la planète, quatre ont leur siège social au Canada, selon une étude publiée hier par Earthworks de Washington et le groupe MiningWatch Canada d'Ottawa.
Les quatre grandes minières visées, qui ont leur siège social au Canada sont Barrick Gold, Goldcorp, Teck et Vale. Quant à la société suisse Xstrata, Québec l'a autorisée en septembre à augmenter sensiblement sa production à sa mine Raglan dans la région couverte par le Plan Nord.
Selon l'étude, dont le lecteur pourra prendre connaissance sur notre site Internet, chaque année, les minières de la planète rejettent ensemble 180 millions de tonnes de déchets toxiques dans les eaux de la planète, soit en mer, dans les cours d'eau ou dans les lacs. Cela correspond à une fois et demie la quantité de déchets domestiques enfouis chaque année aux États-Unis.
Les rejets des sociétés minières sont généralement constitués de métaux lourds toxiques ou d'autres contaminants chimiques, nocifs pour les humains, la faune et la chaîne alimentaire. Ces toxiques sont principalement l'arsenic, le plomb, le mercure et les cyanures.
Ces minières, précise le rapport, laissent derrière elles des traces souvent indélébiles de leur passage grâce au «double standard» dont elles profitent en se donnant bonne bouche dans nos pays développés, mais en profitant du même coup du manque de contrôles environnementaux dans les pays en développement.
C'est pourquoi les deux groupes proposent notamment aux pays développés d'obliger leurs sociétés minières à devoir appliquer dans les pays en développement leurs normes environnementales en plus de devoir cesser tout rejet dans les eaux et milieux humides si elles n'arrivent pas à réduire la quantité de leurs rejets grâce à de nouvelles technologies.
Le rapport signale qu'une seule minière internationale, soit BHP Billiton de Melbourne en Australie, s'est interdit de rejeter des effluents toxiques ou déchets dans la mer ou les cours d'eau. Mais aucune ne s'interdit de le faire dans des lacs.
Cours d'eau contaminés
Le problème est encore plus grave, note le rapport, dans le cas des minières qui rejettent leurs effluents ou leurs «stériles» (tailings) miniers dans les océans, soit la partie des roches jugée inutile mais qui peut néanmoins libérer d'autres métaux et minéraux. En mer, il n'y a pas moyen de réparer les dégâts comme on peut parfois le faire à grands frais dans les cours d'eau contaminés.
Le rapport signale que Barrick Gold a rejeté notamment des déchets miniers dans deux lacs du nord de la Colombie-Britannique. Il signale que Goldcorp, dans laquelle la Caisse de dépôt et placement du Québec a investi, a utilisé un lac du nord de l'Ontario pour empiler ses stériles et que son associée, Mt. Milligan Mine, projette de le faire dans un ruisseau et un milieu humide de la Colombie-Britannique.
Quant à Rio Tinto, on lui reproche des rejets importants en Papouasie de l'Ouest et au lac Carol au Labrador. Sa partenaire Diavik Mine a utilisé elle aussi un petit lac pour entreposer ses déchets miniers. Quant à la minière Teck, on lui reproche des rejets de déchets contenant du zinc et du cuivre dans le Trout Pond à Terre-Neuve et à son ancienne mine de Little Cornwallis Mine au Nunavut. Enfin, Xstrata, selon les deux groupes, rejette des déchets contenant du nickel et du cuivre dans une partie du lac Moose en Ontario et des déchets contenant du zinc et du cuivre à son usine de Matagami «dans ce qui était le lac Watson au Québec».